Peer Gynt par Ibsen, scène 1, acte I
ASE : Peer, tu mens.
PEER GYNT (sans s'arrêter) : Non, je ne mens pas !
ASE : Alors, jure que c'est vrai !
PEER GYNT : Pourquoi jurer ?
ASE : Tu vois, tu n'oses pas ! Tout est faux, tout est fou !
PEER GYNT (il s'arrête) : Non, c'est vrai - Tout est vrai !
ASE : Tu n'as pas honte devant ta mère ? D'abord tu cours dans les rochers des mois entiers, au plus fort des travaux, chassant le renne dans les neiges, tu rentres à la maison la fourrure en lambeaux, sans fusil, sans gibier - et à la fin, les yeux grands ouverts, tu voudrais que je croie tes mauvais rêves de chasseur ? Alors, où l’as-tu rencontré, ce bouc ?
PEER GYNT : A l’ouest de Gendin.
ASE (elle se moque) : oui, vraiment ! (...) Elle s’arrête tout à coup, le regarde la bouche ouverte avec de grands yeux, ne peut plus trouver ses mots, et pour finir s’écrie: Oh ! le démon, oh ! l’effronté. Dieu de Dieu, comme tu sais mentir ! Ce morceau que tu me refiles, ça y est, je me souviens l'avoir appris jeune fille, quand j'avais vingt ans. C'est à Gudbrand Glesne que c'est arrivé, tiens, pas à toi!
PEER GYNT : A moi comme à lui. Ça peut bien arriver deux fois.
ASE (en colère) : Oui, ça peut se retourner la tête en bas, un mensonge, puis se remettre sur son trente-et-un et se vêtir de peau neuve, si bien qu'on ne voit plus sa carcasse. Tu as menti à tour de bras et tant forgé de frayeurs muettes qu'on finit par ne plus savoir ce qu'on savait depuis toujours.
Et puis, l'émouvante mort d'Ase, de Grieg, à écouter en ouvrant un nouvel onglet, c'est mieux.
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